Le géant de la publicité aurait caché pendant un an que les performances exceptionnelles de ses publicités vidéos étaient mal calculées.

Le virage vers la vidéo sociale aurait-il été basé sur un mirage? Mark Zuckerberg proclamait pourtant en 2016, sur la base de chiffres mirobolants, la venue d'un «nouvel âge d'or» pour la publicité et les médias, grâce à ce nouveau format. Dès 2016, un article du Wall Street Journala pourtant accusé Facebook de surestimer ces bons résultats de 60 % à 80 %. Une nouvelle plainte, déposée ce 16 octobre aux États-Unis par un groupe d'annonceurs, dépeint un tableau plus noir encore.

Facebook aurait augmenté de 150 % à 900 % les taux d'impressions publicitaires de vidéos. Or c'est sur la base de ces indicateurs que se fondent les acteurs de l'écosystème pour mesurer où diriger leurs efforts… et leurs moyens. Nombre de médias ont monté des équipes dédiées et investi des millions d'euros pour s'équiper de studios et matériel vidéo. Les annonceurs ont suivi, guidés par des mesures aujourd'hui contestées - y compris par Facebook qui les a depuis modifiées. Mais les plaignants mettent à mal les efforts du géant.

 

Information très tardive

 

D'après les documents internes auxquels ils ont eu accès, Facebook était au courant, dès 2015, d'un problème lié à sa mesure d'audience. La plateforme n'en aurait informé ses partenaires qu'un an plus tard. Alerté à plusieurs reprises par des annonceurs étonnés de certains résultats aux performances à peine croyables - comme des taux de visibilité de 100 %! -, Facebook n'aurait «pas pris au sérieux la vérification de ses paramètres» avant que le scandale n'éclate. «L'équipe d'ingénieurs chargée de réparer les erreurs comptait seulement deux personnes», expliquent ainsi les plaignants. Ils s'étonnent de ce que Facebook ait si longtemps refusé de se soumettre à un audit extérieur. «C'est un peu comme si un étudiant se donnait lui-même sa note», affirment-ils dans leur plainte.

Facebook n'a pas manqué de réagir. «Cette poursuite est sans fondement […]. Nous avons signalé l'erreur à nos clients dès que nous l'avons découverte.» Depuis fin 2017, le réseau social s'est soumis à l'audit du Media Rating Council, une organisation indépendante, pour certifier ses outils de mesure d'impressions publicitaires sur les fils d'actualité de Facebook et Instagram. Facebook attend par ailleurs les conclusions de deux audits supplémentaires: l'un pour vérifier les intégrations tierces sur la visibilité publicitaire, l'autre portant sur l'option d'achat de vidéos vues à deux secondes.

Ces efforts sont accueillis avec scepticisme par Digital Content Next, l'une des plus puissantes associations de médias américains. Ce sont d'ailleurs les avocats du groupe d'éditeurs qui ont œuvré pour rendre publique cette nouvelle plainte. «Nous avons voulu lever les scellés sur ces documents afin d'engager une plus vaste discussion sur la façon dont Facebook pousse les annonceurs et les éditeurs à prendre des décisions importantes sur la base d'informations mensongères», explique au Figaro Jason Kint, président de l'association.

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