Elle est venue à Paris, depuis son village masaï du Kenya, pour participer à la conférence organisée le 22 février par l'association Femmes en action contre l'excision. Une suite logique pour Nice Nailantei Leng'ete, 29 ans, militante habitée et inspirante, ambassadrice de l'ONG Amref Flying Doctors, et élue l'an passé l'une des « 100 femmes les plus influentes du monde » par le « Time Magazine ». Il faut dire que son destin force le respect. Elle ne se lasse pas de le raconter de sa voix douce, mais avec une détermination palpable. « J'avais 8 ans à la mort de mes parents, et j'ai réalisé que l' excision était pour bientôt, se souvient-elle. Cela signifiait que j'allais devoir arrêter l'école, qui me passionnait tant car, dans ma communauté, les filles excisées sont ensuite bonnes à marier. » De fait, son oncle, chez qui elle vit avec sa soeur, veut la faire mutiler au plus vite. « Nous nous sommes enfuies chez une tante qui habitait à 70 km, mais il nous a rattrapées, explique-t-elle. La fois suivante, je suis partie sans ma soeur et me suis cachée chez mon grand-père ». C'est cet aïeul bien-aimé, un ancien très écouté dans le village, qui va jouer un rôle crucial une fois converti par sa petite-fille à l'idée que les mutilations génitales ne sont pas nécessaires. « Il m'a soutenue, grâce à lui j'ai échappé à l'excision et j'ai pu poursuivre ma scolarité. ».

À partir de ce moment-là, rien ne sera plus pareil dans la vie de Nice Nailantei Leng'ete. Elle veut s'engager pour changer les mentalités dans sa communauté. Soutenue par l'Amref, première ONG de santé publique en Afrique, elle va donc porter la bonne parole. D'abord, elle convainc le conseil des Anciens de la nécessité de revoir les traditions, et notamment la poursuite des cérémonies d'excision. « Nous avons de très beaux rituels et il n'était pas question de tout abandonner, décrit-elle. Nous avons proposé de mettre en place un rite de passage alternatif, pendant lequel les jeunes filles sont célébrées et reçoivent une formation sur leurs droits, notamment celui à l'éducation et à la santé. Mais plus d'excision ! Ça fait presque dix ans maintenant et nous avons contribué à sauver 16 000 jeunes filles. » Depuis, elle parcourt son pays pour vanter cette alternative sans violences. Elle donne aussi des conférences dans le monde entier - un talk TED à Amsterdam, un speech aux Nations unies. Surtout, elle ne compte pas s'arrêter là. « Pour peser encore plus et promouvoir la cause des femmes, j'envisage de me lancer en politique », assène-t-elle tout sourire. Retenez bien son nom : il devrait résonner fort dans les prochaines années.

 

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