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Depuis que nous sommes capables de manger solide, la règle est simple : se nourrir au réveil coûte que coûte. Le premier repas de la journée serait le plus important (il représente 25% des apports journaliers), le sauter nous condamnerait aux neurones en mousse et au coup de fatigue en milieu de matinée, à manger deux fois plus au déjeuner et donc à nous exposer à la prise de poids. De quoi faire douter jusqu'aux frileux de la tartine.

Pour parfaire la liste des réjouissances, des travaux américains publiés le 16 avril dans la revue Journal of American College of Cardiology (lien en anglais) mettent en avant un risque accru de mort d’origine cardiovasculaire chez les personnes qui ne petit-déjeunent pas. Si ces résultats sont à prendre avec des pincettes (les travaux n’ont pas permis de prouver un lien de cause à effet, seulement une association), ils n’en font pas moins tiquer, et succèdent à plusieurs études associant l’absence de petit déjeuner à des risques pour la santé. Qu’en est-il vraiment ?

Un besoin de carburant

Si l’on se concentre sur les besoins du corps, le petit déjeuner est effectivement un repas important en raison de sa fonction première : couper le jeûne de la nuit. «Nous avons épuisé les réserves de la veille, notamment celles de sucres, pour assurer nos fonctions vitales comme respirer, digérer, maintenir l’activité cérébrale et effectuer la régulation thermique. Le corps attend donc la compensation, d’autant que l’on reprend une activité physique rapidement le matin», indique Philippe Pouillart, enseignant chercheur en pratique culinaire et santé à l'Institut polytechnique UniLaSalle à Beauvais. Le professionnel rappelle également que la matinée est le moment le plus opportun pour métaboliser les protéines et les glucides.

 

Se nourrir évite aussi la fatigue de milieu de matinée et la baisse de vigilance. «Le petit déjeuner est quasiment obligatoire pour les enfants, les adolescents, les femmes enceintes, les personnes âgées ou à pathologies», estime le Dr Catherine Serfaty, médecin nutritionniste.

À privilégier mais pas indispensable

Si le repas est important, difficile pour autant d’affirmer que les non-adeptes prennent des risques pour leur santé, selon le professeur François Mariotti de l’Institut des sciences et industries du vivant et de l’environnement AgroParisTech. «On ne sait pas grand-chose de ferme sur le sujet car les données les plus cohérentes sont épidémiologiques. En clair il s’agit d’études qui montrent comment les choses sont associées, ce qui ne permet pas rigoureusement de conclure à la relation de cause à effet.»

Si rien, pour l’heure, n’a permis de démontrer un lien de cause à effet, le Pr Mariotti souligne tout de même que «les données convergent et que plusieurs études mettent en avant des associations fortes. Il est rare que l’on ait des certitudes en matière de nutrition, mais le petit déjeuner semble être plutôt un repas à privilégier».

S’écouter et manger lorsque l'on a faim

Seulement voilà, par manque de temps ou tout simplement parce qu’ils n’ont pas faim, certains ne petit-déjeunent pas au réveil. 20% des adultes français ne mangent pas tous les matins, selon les derniers chiffres du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc), en 2015.

Faut-il se forcer à manger ? Il s’agirait surtout de modifier sa vision du sacro-saint premier repas de la journée, «socialement normé», selon Monique Romon, médecin membre de la Société française de nutrition (SFN). «En France, le petit déjeuner doit être pris avant les activités de la journée. Ce repas est certes important mais il n'est absolument pas indispensable avant de partir travailler. Si le jeûne de la nuit ne doit pas être prolongé trop longtemps - pas plus de 12 ou 14 heures - il peut tout à fait être coupé plus tard», insiste la médecin.

Ce n’est pas un mauvais réflexe s’il est adopté depuis longtemps
 

«Lorsqu'on me dit en consultation que l’on n’a pas l’habitude de manger le matin, je ne modifie rien. Ce n’est pas un mauvais réflexe s’il est adopté depuis longtemps. Il n’y aura pas de modification biologique si l’on ne prend pas de petit déjeuner au réveil», confirme la médecin nutritionniste Catherine Serfaty.

Si certains s’interrogent sur les conséquences d’une absence du repas sur les futures prises alimentaires, la Dr Monique Romon rassure : «On a montré que les gens qui ne petit-déjeunent pas le matin ne mangent pas plus après. En revanche, celles et ceux qui n’ont pas faim auront faim plus tard dans la matinée». D’où l’importance d’opter pour un menu très léger chez soi, «un fruit et une tranche de pain pour l’équilibre hypoglycémique», illustre Catherine Serfaty, ou de se nourrir plus tard, une fois arrivé(e) sur son lieu de travail. Pour rappel, un menu équilibré - et ce pour tous les âges - se compose d’un produit céréalier, d'un produit laitier, d’une boisson et éventuellement d’un fruit, selon les recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS).

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