J’ai quitté Conakry très tôt, très jeune parce que mes parents souhaitaient une meilleure éducation pour moi. Je suis partie vivre au Sénégal où je suis restée 7 ans.


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C’est de là-bas que je suis partie à New-York. En partant, je suis passée par le Portugal. En arrivant là-bas, j’avais 200 dollars, une personne m’a escroqué 100 dollars pour une carte de crédit téléphonique, je me suis donc retrouvée avec 100 dollars aux États-Unis.

Quand je suis arrivée au New-York, je me suis mariée, j’ai été mannequin, maquilleuse, puis styliste pour les hommes. Je me suis vraiment essayée à tout dans ces domaines. Comme tout le monde, j’ai rencontré des difficultés, mais je n’ai jamais baissé les bras. Je me souviens encore, lorsque je suis arrivée à New-York, on voulait m’envoyer dans un salon de coiffure pour tresser comme la majorité des femmes Africaines qui arrivent ici, je me suis opposée catégoriquement. Et vous pouvez retrouver ce petit passage dans le film “Dreamgirls”. J’ai dit non, je ne suis pas venue ici pour ça, je vise plus loin. Je veux être comme les femmes de ce pays parce que je ne me sens pas différente d’Oprah, de Beyoncé ou de qui que ce soit. C’est ce message que je voulais envoyer aux jeunes filles, à tout immigrant qui part dans un autre pays. Ils doivent savoir qu’ils ont les mêmes possibilités que les autres. Moi, j’ai toujours rêvé grand. S’il y a une chose que mes proches apprécient le plus chez moi, c’est cet aspect de ma personnalité. Je me suis vue grande depuis le début, je me suis vue là où je suis avant d’y être.

Toutes ces compagnies que j’ai aujourd'hui, j’ai travaillé dessus pendant longtemps et j’ai dévoilé chacune, années après années. Quant au textile, c’est une grande histoire de famille, un héritage. J’avais mon oncle qui était tailleur. Je partais tout le temps à son atelier, je prenais des petits bouts de tissus pour habiller ma poupée. Je voulais toujours être différente, mais pour dire la vérité, je ne savais pas que tout ça s’appelait la mode. Je n’avais aucune idée. Tu peux t’imaginer à l’époque dans un pays comme la Guinée ? C’est au Sénégal que j’ai découvert ce que tout ça signifiait. Ma grande sœur était un mannequin célèbre. Elle défilait, donc j’ai pu apprendre auprès d’elle.

J’ai toujours cultivé la pensée positive. Plus jeune, avec des copines, quand on sortait des classes, on s’asseyait pour parler de nos rêves, je prenais toujours une craie pour écrire mon plus grand rêve, aller aux États-Unis. Je le voulais vraiment, je le matérialisais ainsi en l’écrivant. Je disais que je voulais venir aux États-Unis, mais je ne m’attendais pas à une telle tournure. Je ne suis juste qu’au début. Le plus grand arrive.

Les deux grandes difficultés auxquelles j’ai dû faire face en venant ici étaient liées au fait que je sois une femme noire grande qui voulait se lancer, et le manque de respect. Le plus grand challenge pour moi était de casser cette image superficielle que les gens avaient. Je me suis battue pour qu'on me voit comme je suis réellement. Une femme avec des valeurs. Ça a été mon plus grand combat. Je me souviens quand je suis arrivée la première fois au Nations Unies avec la coupe de cheveux afro, la fleur... Les gens sont venus me demander de changer mon look. Je leur ai fait savoir qu’il n'en était pas question. Je suis la femme noire atypique. Je ne veux pas me lisser les cheveux. Et, ils ont pu voir le potentiel en moi quand ils m'ont vu travailler et agir.

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Michelle Obama a porté mes créations, mais je n’ai pas eu l’occasion de la rencontrer. À cette période-là, elle était vraiment occupée. Mais vous savez, mon film Dreamgirls a été projeté pour la première fois à la Maison Blanche. Michelle Obama nous a donné la chance de le diffuser là-bas en avant-première. J’y étais avec ma mère, ma sœur, et c’était très émouvant. Malheureusement, elle était en déplacement, elle n’a pas pu y assister. Mais là, on est en train de préparer quelque chose, le moment venu, j’en dirai un peu plus.

J'étais aux États-Unis pour accomplir mon rêve Américain, je suis revenue et aujourd’hui, je veux montrer au monde que le rêve Africain existe. Quand tu regardes d’où je suis partie, de ce petit quartier perdu de Conakry, à ce que je suis devenue, je dis oui je suis le rêve Africain. Mariama doit être le rêve de toute petite fille. J’ai eu des moments où je n’arrivais pas à me nourrir, mais je n’ai pas baissé les bras. Je me suis habillée et je suis partie après mon rêve et je veux que toutes ces filles et ces jeunes hommes sachent que quelles que soient les difficultés qu’on rencontre, nous pouvons en sortir et devenir qui on veut. Et je crois que ce film que je sortirai sur ma vie au mois de mai va inspirer beaucoup de gens parce que le titre est très clair : je dis : « It doesn't matter where you come from, what is most important, it’s where you expect to be ». C’est la fille de Nabaya Conakry qui est venue aux États-Unis et qui a pu accomplir ses rêves.

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