Arrachée à son pays natal l’Afrique du Sud, cette jeune Africaine aux formes hallucinantes est exhibée à Londres et Paris comme une bête de foire. Elle enflamme le monde scientifique, nourrissant malgré elle les théories de la classification des races.

De son nom d’origine, nous ne sommes pas certain. Peut être Satchwe, devenu Saartjie en Hollandais, Sarah en anglais. De son peuple d’origine, nous ne sommes pas plus sûr. Peut être Hottentote, peut être Bochimans, peut être un peu des deux. Elle est sans doute née en 1789, et rapporte dans un procès conduit plus tard, que sa mère était morte alors qu’elle avait deux ans. Elle est dès cette époque asservie par une famille de fermiers boers, qui la cède à un autre membre de la famille, Hendrick Caezar, habitant les environs du Cap. C’est lui qui la décide, contre promesses de fortune et de liberté, d’exhiber en Angleterre son corps, caractérisé par une hypertrophie des hanches et des fesses (stéatopygie) et des organes génitaux protubérants (macronymphie, que l’on nomme à l’époque tablier génital).

 

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La jeune femme est d’abord exhibée au Royaume-Uni où elle fait l’objet de nombreuses caricatures et de moqueries, notamment de la presse britannique qui voit en elle un symbole vivant de l’infériorité de " la race noire située au bas de la pyramide évolutionniste " en comparaison à " la race blanche dont la supériorité physique et psychique trouvait une légitimité " à cette occasion.

En 1815, des membres du Muséum national d’histoire naturelle de France demandèrent à l’examiner. Observée sous toutes les coutures, Saartjie Baartman fit l’objet d’un rapport concluant que son physique la rapprochait des animaux, notamment des singes. Saartjie Baartman, qui vivait dans des conditions insalubres, est décédée le 29 décembre 1815 des suites d’une pneumonie.

Son corps fut récupéré par Georges Curvier – un anatomiste français connu pour ses théories racistes – qui en fit un moulage et le disséqua. Ainsi certaines " parties-clés " de son corps (anus, organes génitaux, cerveau, etc) furent conservées dans du formol et son squelette fut extrait et reconstitué afin d’être exposé. Le squelette de Saartjie Baartman fut ainsi exposé au musée de l’Homme jusqu’en 1974 puis placé dans les réserves du musée.

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Les restes de Saartjie Baartman firent l’objet de demandes incessantes de restitution de la part de l’Afrique du Sud régulièrement refusées par la France et par certains scientifiques arguant du fait que la dépouille appartenait au " patrimoine inaliénable de l’Etat français et de la science ". Il fallut attendre la fin des années 1990 pour que la situation se débloque. En 2002, soit 185 ans après son décès, la dépouille de Saartjie Baartman fut restituée à l’Afrique du Sud, où elle fut inhumée selon les rites du peuple Khoïkhoï.

 

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