Quand vous interrogez les mélomanes au Sénégal sur les plus grandes figures du hip hop dans le pays, certains noms sont régulièrement évoqués. Les acteurs du secteur, eux, en citent d’autres, plus ou moins connus du grand public, qualifiés d'”incontournables” par Keyti, rappeur respecté dans son pays et à l’étranger. Sélection de personnalités ayant marqué le mouvement au Sénégal.

Les figures les plus citées

Pour Keyti, “il y a clairement 2 ou 3 générations qui ont été façonnées” par quatre groupes : PBS, Daara J, Pee Froiss et Rapadio, qui “ont eu des impacts différents, mais ont tous donné une direction et permis une redéfinition de l’identité du rap sénégalais.”

PBS (Positive Black Soul)

Créé en 1989 par DJ Awadi (Didier Awadi) et Duggy-Tee (Amadou Barry), ce groupe est considéré par beaucoup comme le “possee” précurseur, avec un mot d’ordre devenu célèbre : “Boul falé” (“Ne t’occupe pas”, en wolof), invitant alors les jeunes à ne pas compter sur les politiciens et à se prendre eux-mêmes en charge.

Au fil des ans, il a vu ses rangs grossir de nouveaux membres puis se dégarnir, tout en permettant au duo initial de mener des carrières solo. Awadi et Duggy-Tee sont remontés ensemble sur scène en décembre 2014 à Dakar pour célébrer les 25 ans d’existence de PBS. “Je ne suis pas sûr que le rap serait là aujourd’hui sans PBS. Pour moi, c’est un patrimoine”, dit M. Ba.

Rapadio

Fondé notamment par Keyti (Cheikh Sène), Kool Kock 6 (Babacar Diagne), Bibson puis Iba, ce groupe était considéré comme faisant partie de la mouvance “hardcore”, tranchant par ses textes et la qualité de son écriture sans concession avec d’autres collectifs existant au même moment, mais Rapadio aujourd’hui n’existe plus.

Pee-Froiss 

Créé en 1993 notamment par Xuman (Makhtar Fall), Daddy Bibson et DJ Gee Bayss (Georges Martin Lopis), il a été rejoint par d’autres et était aussi réputé pour son rap engagé et virulent. Le groupe a disparu de la scène sénégalaise.

Daara J / Daara J Family

Lancé en 1992 par Faada Freddy (Abdou Fatah Seck), Ndongo D (Mamadou Lamine Seck) et Lord Alajiman (El Hadji Mansour Jacques Sagna) ainsi que par DJ Makhtar (ou Makhou, Makhtar Diop), c’est aujourd’hui un duo rebaptisé Daara J Family depuis le départ de Lord Alajiman. DJ Makhtar quant à lui, est décédé en 2007. Faada Freddy et Ndongo D demeurent dans le groupe, qui se produit au Sénégal et à l’étranger dans des concerts très attendus. Faada Freddy mène parallèlement une carrière solo et a été encensé notamment par la critique avec son album Gospel Journey. Ndongo D prépare la sortie de son premier album solo.

Wa BMG 44

Formé en 1992, ce groupe a été baptisé d’après les initiales de ses fondateurs : B de Babacar Niang (alias Matador), M de Makhtar le Kagoulard et G de Omar Gaye, avec “44” comme référence à 1944, année du massacre de tirailleurs sénégalais par des soldats français à Thiaroye, leur quartier en banlieue de Dakar, selon les explications que propose Matador à l’artiste et cinéaste Fatou Kandé Senghor dans “Wala Bok – Une histoire orale du hip hop au Sénégal” (Editions Amalion, 2015), une anthologie sur le mouvement. Le sigle BMG s’est ensuite décliné en plusieurs interprétations, au gré des arrivées de nouveaux membres dans ce collectif, porte-drapeau de la banlieue dakaroise. Le groupe existe, mais semble reposer aujourd’hui sur les épaules de Matador.

Dip Doundou Guiss

Qualifié de prodige, Dip Doundou Guiss (Dominique Preira), 26 ans, est l’un des rappeurs les plus “audacieux” de ces dernières années, commente Samba Badji, journaliste familier du milieu hip hop Galsen. “À l’instar des pionniers, il redéfinit la place du rappeur dans la société sénégalaise. Au niveau artistique, il a un apport indéniable qui est en train de ‘libérer’ le rap auparavant tenu à certaines règles prédéfinies (‘vrai rap’ contre ‘rap commercial’)“, estime Keyti.

Par ailleurs, Keyti et Ndongo D sont individuellement cités par beaucoup de mélomanes et connaisseurs du hip hop Galsen comme des virtuoses de l’écriture. “Ils sont très bons en texte. Ndongo D a un verbe artistique. Keyti a une immense culture et une plume extraordinaire“, assure Samba Badji.

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