Récemment, L’African Fashion Talents signait sa première édition au Sofitel Tour Blanche Casablanca. Une initiative portée par Nawal Debbouze ainsi que par Zaineb El Kadiri, dédiée à la mode, à la création et aux jeunes talents. Rencontre avec Nawel Debbouze, une jeune et talentueuse designer, qui a l’ambition d’accompagner les créateurs africains dans leur accomplissement et réalisation artistique, par la mise en place d’une plateforme d’appui et de financement.

Comment vous est venue l’idée de créer un festival de mode africain à Casablanca ?

En tant que créatrice de mode, il m’est paru nécessaire d’organiser un festival au Maroc, aux portes de l’Afrique pour promouvoir les jeunes talents africains. Il me semblait également essentiel de l’organiser dans la capitale économique du  Maroc, mon pays d’origine. L’Afrique regorge de richesses multiples, et d’un héritage précieux légué par nos ancêtres. Un héritage qu’il est important de préserver et de faire rayonner au-delà du continent. Nous avons échangé avec plusieurs créateurs de mode africains, riches de leur culture et passionnés par leur métier. Nous avons décidé de faire le tour de l’Afrique, du nord et sud, nous avons des créateurs de Tunisie, du Sénégal, du Ghana, de la Côte d’Ivoire, du Nigeria, de l’Ethiopie, du Kenya, de la République démocratique du Congo, de l’Angola, de l’Afrique du Sud, ainsi que du Mali, et du Gabon. Nous nous sommes arrêtés sur des créations d’une immense beauté, et d’un raffinement certain. Je suis une jeune designer qui est consciente des difficultés liées à ce métier et des besoins que nécessite la mode, que ce soit au niveau de la formation ou du financement, c’est la raison pour laquelle nous avons mis en place cette plateforme d’aide aux créateurs africains. Nous avons tenté à travers ce festival de trouver des solutions pragmatiques et pérennes à leur difficulté.

Comment avez-vous séléctionné les créatuers participants?

Nous avons reçu près de 300 candidatures. Nous avons également choisi des talents à travers notre réseau, car nous avions été très attirés par le travail de certains jeunes créateurs que nous avions découvert un peu par hasard. Nous les avons longuement écoutés, car ce sont avant tout des histoires humaines et des parcours incroyables. Certains sont « des combattants », qui ont tout donné pour arriver la où ils sont aujourd’hui. Ils ont investi leur temps et leur énergie pour leur passion. De créer en Afrique aujourd’hui n’est pas chose aisée, il faut avoir les moyens de ses ambitions. Le but à travers ce festival, c’est de faire de l’accompagnement de ces jeunes talents, tout au long du processus de création, jusqu’à l’exposition de leurs œuvres artistiques sur le marché.

Des tables rondes ont été mises en place pendant ce festival, avez-vous conclu des partenariats?

Nous avons invité plusieurs organismes de financement, des représentants de la Banque Africaine de Développement, des politiques, mais également des partenaires et des sponsors, qui nous ont fait l’honneur d’accepter de nous suivre dans cette nouvelle aventure Africaine. Nous devons travailler tous main dans la main, pour essayer de trouver des solutions et avancer tous ensemble, car l’union fait la force. Nous avons mis en place des tables rondes pour faciliter la communication transversale entre les bailleurs de fond, les créateurs, et les organisateurs d’autres festivals, tels que Alphadi qui prépare le « Fimme », un festival de mode et du design en novembre prochain, à Dakhla au Maroc. Nous avons sollicité également plusieurs ateliers au Maroc, et des usines, pour aider certains créateurs africains qui manquent cruellement de moyens.

Vous avez lancé récemment une ligne de sac à main au Maroc « Jude Jude ».

J’ai toujours été passionnée par la mode, le prêt à porter, les chaussures et les sacs, mais j’ai choisi de mettre en avant les sacs a main il y trois mois à Paris pendant la Fashion Week. Nous avons également lancé à travers « l’African Fashion Talents », une nouvelle collection de prêt à porter africain avec des costumes et des vestes en wax, dont nous avons « déniché » les tissus à Dakar. Une ligne épurée qui reflète le chic, l’élégance de la femme africaine, tout en simplicité. Les sacs, sont réalisés en jude, de la toile « blé de paille » retravaillée, pour être plus moderne. Nous avons un atelier à Marrakech ou tout est réalisé à la main, et une boutique qui distribue notre marque « Jude Jude ». Nous prévoyons dans les prochaines années des points de vente, à Rabat, Casablanca, et Tanger.

Est-ce que votre frère Jamel Debbouze vous encourage dans vos nouveaux projets? N’avez-vous pas peur que le nom « Debbouze » vampirise la médiatisation de cette première du genre ?

Nous sommes dans deux domaines différents, lui est dans l’humour, et il le fait très bien, et moi dans la mode. Par conséquent, nous n’avons pas le même positionnement. Bien évidemment, nous sommes avant tout une famille, et de ce fait, nous avons toujours été très liés, nous nous soutenons dans nos carrières professionnelles, et nous échangeons de temps en temps à ce propos. Jamel a tendu la main à des jeunes qui n’avaient pas les moyens de se produire à travers le « Djamel Comedy Club », Nous sommes dans la même démarche de promouvoir la jeunesse. Nous sommes dans un esprit d’entraide, nous savons d’où nous venons, nos parents sont arrivés avec des valises, d’un autre pays, et nous avons eu la chance de réussir. On me donne, je transmets.

Peut-on s’attendre à d’autres éditions de « l’African Fashion Talents » dans d’autres capitales africaines tels qu’Abidjan, Dakar, Johannesburg...

Nous l’espérons fortement. Nous avons comme ambition de parcourir le continent et de découvrir toutes ces richesses cachées. Nous prévoyons une caravane qui va parcourir l’ensemble du continent. Nous allons regrouper des groupes de travail pour suivre le cheminement, et la progression de ce projet, et responsabiliser les politiques et les financiers. Le groupe Accor accepte d’ouvrir tous ces établissements sur le continent pour accueillir les créations des jeunes talents africains et exposer leurs œuvres. Par ailleurs, les financiers vont réfléchir à des modèles économiques adéquats, à travers des solutions appropriées tels que le micro crédit, pour pouvoir aider les artistes à travailler dans les meilleures conditions. Nous avons eu plusieurs partenaires au Maroc, dont le Morocco Mall, le Sofitel, Yan One, MAAP Academy, l’OCP, l’AMCI, Babaloo, la Casa del José, l’Hôtel Gauthier. C’est un festival de continuité, il y aura d’autres éditions et des axes de progrès. Nous avons en place des tables rondes pour échanger, discuter, relever, souligner toutes les problématiques. Nous avons des richesses en Afrique, exploitées par d’autres pays. Il faut y remédier. Cette plateforme est un espace d’échange, elle est en adéquation avec le message du roi Mohammed VI, qui a placé l’Afrique au cœur du Maroc, et le Maroc au cœur de l’Afrique. L’Avenir de l’Afrique passe par sa jeunesse, nous avons la mission de contribuer au rayonnement du continent.

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