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La liberté est une notion clé en philosophie, au programme de terminale. Elle se définit, négativement, comme l’absence de contrainte; positivement comme l’état de celui qui fait ce qu’il veut.

La liberté est étonnamment un concept assez moderne, puisque les Grecs en parlait peu, considérant que l’homme devait plutôt refléter le cosmos plutôt que d’obéir à ses propres aspirations. Ce sont les Modernes, à partir de Kierkegaard, puis Heidegger et Sartre, qui ont fait de la liberté une réflexion centrale de la philosophie, comme en témoignent les citations célèbres sur la liberté.

Introduction
La question principale est celle de la définition et de la preuve de la liberté., justifiant le “sentiment vif et interne” (Descartes) que nous avons d’être libre et qui se trouve en tout homme.

Pour définir la liberté, il suffit d’en donner une description adéquate :

– Au niveau biologique, la liberté s’identifie avec un organisme en bonne santé. Le malade, au contraire, se sent prisonnier de son propre corps

– Au niveau plus élevé, la liberté s’identifie avec la spontanéité des tendances. L’homme est libre quand il peut réaliser ses désirs (Epicure). Mais certaines tendances sont néfastes et nous luttons naturellement contre elles. La spontanéité ne peut donc consister à oébir à ses passions.

– Au niveau de la conscience, la liberté se définit par la possibilité de choisir. Pour qu’il y ait choix, il faut plusieurs motifs, plusieurs possibilités d’action. Le choix peut être impossible lorsque tous les motifs valent (âne de buridan). Dans ce cas, l’action relève de la liberté d’indifférence.

– Au sens le plus plein, la liberté est une réalisation volontaire, justifiée par le plus grand nombre de motifs. Car notre action est alors non seulement l’expression d’un choix personnel, mais d’un choix capable de se justifier rationnellement aux yeux de tous. Après Platon et Spinoza, Kant a donné toute son ampleur au rationalisme de la liberté : l’action est libre lorsque la conscience se détermine “contre” les désirs sensibles, en fonction d’un principe rationnel.

– La liberté n’est au fond pas dans ce qu’on fait, mais dans la manière dont on le fait. La liberté est une attitude, celle de l’homme qui se reconnaît dans sa vie, qui approuve l’histoire du monde et des évènements. C’est pourquoi la liberté consiste souvent à “changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde” (Descartes). C’est à une telle conception (celle des stoïciens) que les modernes (Sartre, Kierkegaard) sont revenus ; l’homme devient libre lorsqu’il substitue une attitude active à une situation subie, lorsqu’il prend parti à l’égard des évènements de son temps : bref la liberté se prouve en se réalisant, lorsque l’homme réalise son destin en oeuvrant au lieu de le subir.

Cours sur la liberté
« Quand on se suffit à soi-même, on arrive à posséder le bien inestimable qu’est la liberté » (Epicure)
Face à la liberté s’oppose l’idée de destin, de déterminisme, de fatalité (fatum) comme synonyme d’un enchainement inexorable entre les causes et les effets et dont on ne pourrait s’extraire. L’illustration de ce fatum : Œdipe qui n’échappe pas à l’oracle de Delphes : il tua effectivement son père et épousa sa mère.

A l’origine, abandonné par ses parents biologiques afin de l’écarter du terrible présage, Œdipe est élevé par des parents adoptifs. Adulte, il part, se querelle avec un homme et le tue (il ignore qu’il vient de tuer son père biologique). Puis Œdipe donnera la bonne réponse au sphinx, sera reçu triomphalement dans la ville qu’il vient de libérer de la domination du sphinx : il devient alors roi en épousant la reine (ignorant que la reine est sa mère biologique) : de leur union naitra Antigone… Une fois qu’il apprend la vérité, il se crève les yeux et erre en mendiant.

La liberté : un arrachement à la fatalité, un arrachement face au loi de la nature, un arrachement au déterminisme…

La liberté : le pouvoir de choisir
Epictète : « Tu es maître de ma carcasse ; prends-là, tu n’as aucun pouvoir sur moi »

Descartes : « La liberté  de notre volonté se connait sans preuve, par la seule expérience que nous en avons »

Paul Valéry : « liberté, c’est un de ces mots détestables qui ont plus de valeur que de sens »

Rousseau : « La liberté consiste moins  à faire sa volonté qu’à n’être soumis à celle d’autrui ; elle consiste encore à ne pas soumettre la volonté d’autrui à la nôtre ».

La notion de liberté peut être comprise comme synonyme d’une absence totale de contraintes, d’entraves quant aux désirs de chacun et leur réalisation. La liberté serait alors synonyme de « licence ». Or, dire oui à tout ce que l’on désire peut-être également la manifestation d’un manque de liberté, d’une aliénation, être esclave de ses passions.

La liberté suppose des contraintes, des limites, des interdits car la liberté est aussi celle des autres. Mais la liberté suppose des limites, quelles sont-elles ?

Elle implique un jeu difficile entre le singulier et l’individuel. La liberté pour tous ne préssuppose-t-elle pas une limite pour la liberté de chacun ?

La liberté est-elle une illusion ?
Le déterminisme : la liberté n’est-elle qu’une illusion ?
La volonté libre n’est qu’une illusion.
Texte de Spinoza, P.401 : « l’éthique »

« Appétits » : tension vers quelque chose. Les hommes se croient libres parce qu’ils ignorent les causes qui les déterminent. Ils se croient libres lorsque leur inclination pour une chose reste légère. Cette légèreté laisse croire qu’on peut choisir librement de suivre ou de ne pas suivre nos impulsions en les contrecarrant, le cas échéant, par une autre impulsion. Cependant, à observer nos choix, force est de constater que nous faisons parfois l’épreuve du remords, du regret…Nous comprenons alors que parfois, tout en sachant le meilleur, nous faisons le choix du pire. Donc, la liberté est une illusion car si le sujet est conscient quant à ses actions il reste cependant ignorant quant aux raisons qui le poussent à agir ainsi : je ne connais que l’efft de l’appétit mais j’ignore l’origine de cet appétit. Ce sont des affections du corps.

L’homme possède la conscience de soi : il est conscient de désirer et pense qu’il désire librement. Il pense que la volonté est libre et qu’elle a un pouvoir sur le corps. Or, cette croyance est une erreur.

Chez Spinoza, la liberté ne va pas de soi, elle n’est pas pour autant impossible à acquérir. Pour accéder à la liberté, l’homme doit se déterminer lui-même à agir et penser. Il doit, pour cela, appliquer à sa raison, décider ce qui est bon et utile. Quand sa raison détermine son agir, alors soumission aux passions se réduit, s’amoindrit.

Si la liberté ne va pas de soi, il n’en demeure pas moins que le déterminisme n’est pas pour autant une fatalité biologique dont on ne pourrait pas sortir. Si elle n’est pas originelle, c’est que la liberté est quelque chose à acquérir, un état à réaliser.

La liberté : quelque chose qui doit être conquis par l’esprit
Kant : la critique de la raison pure

Tout ce qui est produit dans le monde a deux origines

La nature comme origine
La liberté comme origine
La nature : les lois de la nature : l déterminisme : la relation causale : relation de la cause à effet : les mêmes causes produisent les mêmes effets. L’animal est déterminé par sa nature, il ne peut agir autrement que comme sa nature le lui impose.
La liberté : créer quelque chose par soi et pour soi : être à l’origine et à la conséquence de ce qui est produit : donc ne pas être soumis à autre chose que soi-même.
Au XVIII ème siècle, l’athéisme apparait et se développe, mais si l’idée d’un Dieu créateur disparait, l’homme reste lu à partir d’un concept (comme peut l’être le coupe-papier). On le définit par son essence.
La liberté : une idée produite par la raison mais à laquelle aucun objet n’existe dans l’expérience. La liberté : elle est pratique, elle est une action dans le monde. Elle ne peutpas être prouvée, elle ne peut être qu’éprouvée. Elle implique les notions de responsabilité morale, d’éthique pour que la vie en collectivité soit possible.
Avec la pensée de Sartre et l’existentialisme, on retire l’idée de Dieu et celle du concept pour définir l’homme. Dès lors, il y a 1) l’existence, 2) l’essence : l’homme n’est pas originellement déterminé, il n’y a pas de fatalité. Il existe et exister signifie qu’il est le propre créateur de son existence : l’homme est et devient ce qu’il fait de lui, c’est-à-dire qu’il devient les actes qu’il accomplis et qu’il a choisis librement puisqu’il n’est déterminé par aucune nature. Il est absolument libre. Mais cette liberté implique le phénomène suivant : puisqu’il est libre, ses choix le sont aussi, il est donc responsable de ce qu’il est face à lui-même et face à autrui.

L’existentialisme fait que l’homme est créateur de sa propre existence. Mais cette liberté a un prix : la responsabilité : si l’homme est libre, il est responsable de ses actes, de ses choix. Ceci impose donc la question de l’éthique, du devoir, de la limite à ne pas franchir. Liberté et éthique vont donc ensemble : être libre c’est être absolument responsable de ce que l’on est de de e que l’on fait.

La liberté individuelle et la liberté collective. La liberté : un postulat pratique qui permet de mettre en place l’idée morale. La liberté : la capacité à s’autodéterminer.
Texte de Kant P.405 : « la critique de la raison pratique »

« autonomie » : ce qui ne dépend que de soi, par soi. Ce qui n’est soumis à rien d’autre qu’à soi-même. L’opposé d’autonomie : hétéronomie. La Raison pure, la volonté qui détermine la loi morale est certes une maxime qui s’impose au sujet mais qui transcende la simple individualité du moi car valant pour tous les sujets (donc la loi est universelle).
« Hétéronomie » : ce qui est imposé par une volonté extérieure, une contrainte extérieure. Le désir est changeant, il appartient au contingent, il est de l’ordre de la volition et non de la volonté. La volonté libre : celle par laquelle la raison se détermine elle-même. Et la raison est la faculté intellectuelle qui produit l’impératif catégorique qui lui-même conduit au devoir et à la morale. Etre libre, c’est agir relativement à une loi que l’on s’est donné soi-même à partir de l’usage de la raison, de façon impérative et non selon les lois de la nature et de sa petite sensibilité. La liberté : l’autonomie de la volonté et celle-ci est la loi morale.
Si cette définition de la liberté comme étant une chose à conquérir procède d’une capacité à pouvoir se déterminer par la loi morale cette liberté implique des limites éthiques et légales. La liberté n’est-elle pas politique, civile ? La liberté civile implique la perte d’une part de la liberté naturelle par l’instauration de lois, d’interdits qui viennent limiter l’expression de l’individualité « égoïste », « égotiste » au profit d’une liberté collective, civile.

La liberté politique : elle implique la notion de « lois », de « devoir », de « contraintes » pour tous pour que chacun puisse vivre avec chacun.
Avant d’être une question métaphysique, la liberté est avant tout une question politique : avant d’être individuelle, la liberté est collective. Comment pouvons-nous être libres ensemble ?

L’opposition entre la liberté naturelle et la liberté civile : le contrat social comme ce qui permet le passage de l’une à l’autre.

Texte de Rousseau : P.408 : « Du contrat social »

« La liberté consiste moins à faire sa volonté qu’à n’être pas soumis à celle d’autrui ; elle consiste encore à ne pas soumettre la volonté d’autrui à la nôtre ».
Rousseau explique le passage de la liberté naturelle à celle civile.

La liberté naturelle : celle qui consiste à faire tout ce que l’on désire (sans lois, sans contraintes…)elle est sans limite : l’homme ne répond qu’à ses instincts. On parle alors d’état de nature. L’état de nature est une hypothèse de travail pour penser l’homme en-deçà et antérieurement à toute vie en société. Dans cet état de nature, seule la force est la limite, seule la puissance fait autorité. Le désir, l’instinct, les appétits guident et poussent l’homme à agir selon son instinct. Les hommes sont par nature esclaves de leurs passions. Les intérêts particuliers font qu’ils sont dans une lutte incessante. La seule loi qui règne : la loi du plus fort. Tout n’est que violence et chaos.
La liberté civile : une liberté ordonnée, légiférée par des lois qui font que la liberté naturelle qui n’est que violence est remplacée par une liberté dans laquelle la paix est possible entre tous parce que limitée par les lois. Ce sont la justice, la loi, la légalité qui définissent ce que l’on peut faire et qu’il est interdit d’accomplir dans la société civile. L’homme n’est alors plus dans l’instinct mais dans la raison : l’intérêt général prime sur l’intérêt particulier.
Le passage de 1) à 2) : une perte car les hommes ne peuvent plus faire tout ce qu’ils désirent mais aussi un gain car ils ont développé leurs facultés intellectuelles et principalement la raison et de la loi sur le plan moral et sur le plan légal. Ce passage entre la liberté naturelle et celle civile se fait par un contrat, c’est-à-dire l’acceptation par tous les hommes de se défaire d’une part de leur liberté naturelle illimitée et violente au profit de la liberté civile limitée mais pacifiée.
Seulement, la citoyenneté de va pas de soi. Dans la Grèce antique, étaient exclus de la citoyenneté les femmes, les non grecs, les enfants, les esclaves. Par définition, l’esclave est celui qui est au service d’un maître. Sa liberté est niée, il n’est qu’un instrument. On peut donc se demander si, malgré tout, le fait de ne pouvoir jouir de la liberté civile prive de toute forme de liberté. N’existe-t-il pas une liberté métaphysique, une liberté intellectuelle qui permettrait au sujet d’être au-delà des fers, par-delà l’enchainement physique, donc une liberté qui procéderait de la pensée.

Aristote : « Politique »
L’esclave : « l’esclave lui-même est une sorte de propriété animée et tout homme au service d’autrui est donc un instrument qui tient lieu d’instrument ».
Par définition, l’esclave est celui dont la volonté est aliénée à la volonté d’un autre. Il est une chose, il n’est pas considéré comme un sujet, comme celui capable de s’autodéterminer. Il n’est qu’un instrument dont la volonté n’a pas à se manifester.

Cependant, Aristote affirme également la chose suivante : si la nature a produit des esclaves parce que leur cops est robuste, elle a produit des hommes physiquement plus faibles mais intellectuellement aptes à réaliser leur esprit d’hommes libres, il n’en demeure pas moins que : « pourtant le contraire arrive fréquemment aussi ; des esclaves ont des corps d’hommes libres, et des hommes libres des âmes d’esclave ».

La liberté ne pourrait-elle donc pas être métaphysique ?
Pour répondre à cela, il suffit de penser à Epictète : ancien esclave malmené par son maître. Selon Epictète, la liberté est celle de la pensée. Et face à elle le tyran est sans pouvoir. Mais la liberté métaphysique peut-elle se passer de toute expression ou s’atrophie-t-elle si elle ne peut se dire ? Une liberté peut-elle persister si elle reste dans le silence ?

Arendt : « la crise dans la culture »

Arendt explique quela liberté métaphysique n’est pas première mais seconde. Avant tout, la liberté est politique, exemple dans la Grèce antique, la liberté était politique, elle se définissait par la citoyenneté. Sans liberté politique, aucune liberté ne peut se manifester, elle ne peut être mondaine, c’est-à-dire s’affirmer dans le monde, devenir objective, s’objectivité.
L’objectivation de la liberté apparait donc nécessaire car qu’est-ce qu’une liberté qui n’a pas de place pour se dire, pas de place pour se réaliser ? La liberté pour se développer n’a-t-elle pas besoin de se confronter à celle des autres ? Au contact des autres, les idées s’affrontent, se développent…

Une liberté contrainte à rester muette, une liberté qui ne peut agir ne finit-elle pas par mourir ? La liberté dans l’agir implique effectivement le sens même de la liberté : la responsabilité de e que l’on fait face à la liberté d’autrui, la liberté qu’est l’autre.

Conclusion
Que la liberté soit physique ou métaphysique, elle apparait comme relevant davantage de l’idéal que de l’idée définie. Elle demeure un concept indéterminé mais qu’il est nécessaire de présupposer pour parvenir à maintenir l’idée de responsabilité. Sans le concept de liberté : plus à répondre de soi et le déterminisme et la fatalité peuvent devenir des excuses à ce que l’on es Rolland :

« La fatalité, c’est l’excuse des âmes sans volonté ».
Etrange chose que la liberté comme si son indétermination même en faisait le caractère précieux, plus qu’un mot, la liberté est devenue une valeur en soi : Paul Valéry : « liberté, c’est un de ces mots détestables qui ont plus de valeur que de sens ».

« Nous sommes condamnés à être libres »

La liberté n’est pas un choix, elle est un état de fait, une nécessité : on ne peut pas ne pas être libre sinon toute idée de responsabilité disparait…

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