Depuis que les troupes russes ont envahi l'Ukraine le 24 février 2022, le bruit court que, tandis que des millions d'Ukrainiens et d'autres Européens ont cherché refuge dans les pays voisins, les Africains ont été victimes de discrimination dans leurs tentatives de fuir l'Ukraine.
Il semble que la plupart des étudiants, travailleurs migrants et professionnels noirs se soient retrouvés dans la même situation. Chineye Mbagwu, un médecin nigérian de 24 ans qui vivait dans la ville d'Ivano-Frankivsk, dans l'ouest de l'Ukraine, a déclaré au New York Times : "Les gardes-frontières ukrainiens ne nous laissaient pas passer... Ils utilisaient des bâtons pour frapper les gens... Ils les frappaient et les poussaient à l'arrière de la file. C'était terrible."
Emmanuel Nwulu, 30 ans, étudiant nigérian en électronique, s'est vu dire qu'il ne pouvait pas monter à bord d'un train se dirigeant vers l'ouest, en direction de la frontière, parce que "les Noirs ne pouvaient pas monter dans le train".
Dans d'autres cas, les autorités polonaises ont refusé l'admission de personnes noires fuyant l'Ukraine. Selon les rapports, d'autres étrangers en Ukraine ou en Pologne n'ont pas été soumis à ce niveau de discrimination. Les allégations selon lesquelles les Africains seraient victimes d'un traitement injuste violent le droit international, selon l'Union africaine, qui a qualifié ces allégations de "scandaleusement racistes".
Cependant, les choses ont changé au cours des dernières semaines. Les autorités ukrainiennes se sont prononcées contre toute forme de discrimination à l'égard des réfugiés. Certains Africains ont pu quitter l'Ukraine avec l'aide de la Global Black Coalition. De même, certains pays africains ont envoyé des avions en Europe de l'Est pour mettre leurs ressortissants à l'abri.
Mais la question reste posée : Pourquoi les Ukrainiens sont-ils particulièrement méchants avec les personnes d'origine africaine ? Les réponses habituelles sont que les Européens n'aiment pas les gens venus d'ailleurs, que les Africains étaient autrefois des esclaves dans certaines parties de l'Europe et que cela a encore une mauvaise réputation, ou que les Africains sont considérés comme des primitifs et sont donc méprisés.
Mais Il existe une autre explication que les historiens et les scientifiques ont négligée. Dans leur attitude collective envers les Noirs, les Ukrainiens ne sont seuls parmi les Européens blancs. À l'échelle mondiale (en Europe, en Amérique latine, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud, au Zimbabwe, au Canada, aux États-Unis, etc.), les Blancs vouent aux Noirs une haine irrationnelle, viscérale et réflexe qui existe depuis des générations.
Après trois mille ans de raids, d'invasions, de conquêtes, de domination, de colonisation, d'oppression, d'asservissement et, dans certains cas, de civilisation des peuples d'Europe et d'Asie occidentale par des armées noires, le collectif blanc éprouve une antipathie profonde pour les Noirs.
L'Ukraine en est un exemple. La Scythie était l'ancien nom donné à cette terre. Une grande armée égyptienne, dirigée par Senwosret, le "pharaon conquérant du monde", a traversé le sud de la Russie vers 1900 avant J.-C. selon les auteurs grecs Hérodète, Diodore, Plutarque, Strabon et Josèphe. L'érudit Martin Bernal, selon Richard Poe, affirme que le pharaon a laissé une "large bande de villes brûlées, pillées et désolées à travers" la Scythie ainsi que ce qui est aujourd'hui l'Anatolie, la Bulgarie, la Roumanie et la Yougoslavie. Des "Africains très cultivés" ont autrefois habité une Europe primitive encore "pleine de chasseurs de têtes et de cannibales", comme le décrit Edgar Allan Poe.
LEurope de l'Est a peut-être préservé le souvenir des invasions douloureuses de Senwosret (les chercheurs ne savent pas exactement lequel des pharaons Senwosret I, II ou III a mené ces saccages) au cours des siècles, d'autant plus qu'il semble avoir laissé une importante colonie de Noirs africains dans l'actuelle République soviétique de Géorgie. L'invasion et la colonisation par des généraux noirs ultérieurs, tels qu'Ahmose, Thutmose I, Thutmose III, Ramesse II, Nimrod, Taharka et Batricus, ont ravivé ces souvenirs en Europe et en Asie occidentale, respectivement.
Les Maures ou "Blackamoors", qui ont gouverné l'Espagne et contrôlé une grande partie du monde méditerranéen pendant 781 ans, ont été la dernière tribu d'Africains à conquérir certaines parties de l'Europe. Ce sont les Maures qui ont apporté la civilisation dans le sud de l'Europe et ont inauguré la période de la Renaissance pour le reste de l'Europe. La domination oppressive des Noirs a néanmoins fait l'objet d'une résistance jusqu'à la libération de l'Espagne en 1492.
La haine de longue date des Européens pour leurs anciens dirigeants africains s'est transformée en mépris, en colère et en vengeance à l'égard de tous les Noirs lorsque les Portugais et les Espagnols ont commencé à réduire en esclavage les Africains, qu'ils ont d'abord appelés Maures. En Europe occidentale, cette mentalité a été institutionnalisée et étendue, traversant l'Atlantique jusqu'au Nouveau Monde par le biais de la traite des esclaves africains.
Aujourd'hui encore, un désir de représailles né de la suprématie et de l'oppression des Africains en Europe se manifeste en Ukraine et ailleurs par un racisme blanc à l'égard des personnes d'origine africaine.
